Insomnies d’été

28 juillet 2014 § Poster un commentaire

No sleep-source vhseverything on tumblr

Scintillements du reflet de quelque astre dans l’eau. Fin d’un programme télé. Mire alternative.

Relevé à 1 heure. L’orage éclaire la nuit, s’approche. A 1 heures 55, je l’entends. 1 h 58, il s’éloigne, tonne au loin. A 2 h 00, il pleut, juste comme j’écris il pleut. (Combien, le lendemain, paraissent naïves l’attention au moment et sa transcription. C’est oublier le degré de fatigue du moment.)(Il y a donc une attention aux propos écrits ici. Relecture. Mise à distance. Critique.)

Ce lendemain, c’est maintenant 4 h 50. Tourné dans le lit depuis 3 h 20. La décision de ne pas se lever avant 5 h n’a pas tenu, alors, pour la peine, 100 abdos). Le battant de la fenêtre ouverte pour la fraîcheur de la nuit frappait l’espagnolette. Trop bête. 5 h 14, vol de nombreuses mouettes dans le ciel, dont les cris s’éloignent et résonnent dans les rues vides. 5 h 52, nouveau passage des mouettes ou de cigognes ou de… Elles doivent passer au-dessus du boulevard ; je ne les vois pas, les entends seulement.

Le type mentionné ici au début de « Innocente maison », le 5 octobre 2013, vit quasiment tout le temps à poil. Sa grande tenture rouge délavée par le soleil jetée au-dessus d’un des battants de sa fenêtre sert à peine de rideau. 7 h 40, il se passe la main dans les cheveux ou autre part, je ne vois pas, et en remporte quelque chose qu’il balance chaque fois par la fenêtre. 7 h 53, il pend une serviette rouge à l’autre battant.

Toute la journée au radar, ne trouvant pas des livres posés la veille à un endroit, essai de deux siestes, mauvaises heures, rien

Nuit de mardi à mercredi 30 juillet, sommeil exemplaire, décalage aboli, lever 6 h 50, soleil, ciel immense, les volets des vieux déjà ouverts. De quoi s’y mettre.

Jeudi 31 juillet, 11 h 30, le même enfant, par la fenêtre ouverte de je ne sais quel immeuble, hurle, pleure, hurle « je suis calmé, maman, je suis calmé, maman… » 11 h 33, plus rien, calmé.

Le soir, dîner au Mazarin avec Ag.D. et Ar.D. C’est le second couple qui porte les mêmes initiales. Évocation de la jeune rue, le délire du milliardaire mystérieux dans le 3 ème arrondissement, auquel participe Ar. D. Puis, avec eux, un dernier verre au comptoir d’un restaurant de poisson, en face de Cosi, rue de Seine, qui appartient au même proprio. On aura parlé cuisine et aliment quasiment tout le temps.

Les espaces discrets

18 juillet 2014 § Poster un commentaire

B.

The art of Chiaroscuro - Tystnaden- Ingmar Bergman

Une histoire américaine,  mention chaque fois d’un film,  Les Gremlins pour la mère, chaque description référencée

Le classement des premiers niveaux a été le plus difficile à résoudre :: les gros,  les pauvres,  les chômeurs, les alcooliques, le seul  critère de l’argent n’était pas suffisant, il a fallu croiser différents fichiers,  collecter des dossiers médicaux, héréditaires, sociaux…

L’incongruité. Mélange de notes, de fictions, de choses vues, de réflexions. Pas incongrues. Le déroulement d’une journée avec ses variations et ses situations.

Une vie avec coach. Coach pour courir, coach pour déterminer l’heure et l’endroit de sortie du chien, coach pour ne pas se fâcher avec ses amis, coach pour nouveau sport de combat au genou, coach pour augmenter ou réduire sa masse musculaire ou graisseuse, coach pour perdre ce cul, coach pour ventre plat, coach pour choisir sa boutique de jus de fruits, coach pour traiter les peurs, les dépendances, les insomnies, trouver la passion, booster sa confiance, développer son talent, dénicher son désir. Amour, argent, santé. Coach de vie, coach de carrière, coach de sport, coach d’écriture. New York, la ville des coaches. Plus que des associations locales. Le coach repose de la décision prise ou à prendre. Le coach désengage. Il a un programme. Il nous l’applique. Ça va marcher. Il est certifié. Le coach est un boss accepté, un gourou d’une heure, un petit maître assagi personnel (ses performances sont derrière lui ; il ne va pas nous claquer dans les doigts pour suivre on ne sait quel rêve de performance et de gloire ; le marathon, c’est nous qui allons le courir). Il n’est pas forcément moins vieux que nous (qui avons quarante ans et plus). Rire de la vanne d’un coach n’oblige pas à faire allégeance ou à se plier à sa vision du monde ; au contraire, elle le replace à la distance du service rendu et payé, une sous-classe sociale de la nôtre ; vanne ciblée et hautement répétée, on en rira donc car elle aide notre travail. L’absolu premier degré qu’on lui demande ne s’en trouve nullement transgressé. Ancienne demi vedette dans sa spécialité, le coach a des lettres de noblesse : le corps de Brad Pitt dans Troie, c’est lui ; la tenue des pistolets dans Matrix, c’est lui ; la docilité remarquable du rottweiler de Peter, c’est lui ; la longévité du couple…, c’est lui. Le coach remet en selle. Il élimine l’encombrement et les blocs de toute nature qui gênent le succès. Cependant qu’il ne nettoie que sa partie, ne répare qu’un morceau. On ne saurait lui demander une entreprise globale de bien-être. Il n’est pas rétribué pour et n’en a pas les compétences. Pourtant, d’emblée, l’approche de notre cas sera holistique, il l’a dit. Le coach s’occupera de nous comme ensemble. Nous avons focalisé sur notre problème un enchaînement de soucis : ce tonus qui nous manque, ce tour de rein qui nous guette, cette apathie n’ont d’autre origine que cette faiblesse abdominale, ce café au lait, ce triceps qui tombe, cette coupe de cheveux… La source du sentiment est toujours concrète : muscle, aliment, fréquentation, langage, et déploie ses effets positifs ou négatifs sur notre être entier. (((Motivateur dans ses moindres propos, il nous apporte la clarté mentale. Le coach a tellement fait ce qu’il nous fait faire et qu’il fait avec nous, accompagnant, montrant, qu’on le suit sans une once de doute. C’est ça, pas une once de doute à se rouler par terre pour améliorer tel muscle, à picorer d’un pied puis l’autre le plus vite possible, surtout jamais le même, les carreaux figurés par une échelle de corde étendue sur la pelouse (bon, tu recommences et tu m’exploses ce chrono), à descendre l’escalier (le même qui conduit sur rue) en faisant des pompes d’une marche à l’autre et à le remonter itou, à se taper 8 fois 3 tours de la boucle de la piste (soit un peu plus de 6 miles, c’est-à-dire près de 10 000 mètres, devancés par un lièvre (jeune homme hyper musclé, content de sa perf, et le coach aussi, puisqu’il lui tapait à chaque arrivée la main)) avec chrono, à jeter son genou vers l’adversaire qui mime un coup reçu, roule en arrière ou l’esquive. On reprend avec le coach ce qui a fui de nous, en tête-à-tête ou en petit nombre, dans un espace discret quoi qu’il en soit. Personne ne doit nous voir suer, rouge, dans cet état semi comateux où le coach nous pousse au bout de nous-même pour notre salut, retarder notre mort, replaire, rééquilibrer nos chakras, sortir de l’ornière, redevenir héros, redessiner notre avenir. Great Hill, dans Central Park, Upper West Side, est le site rêvé du coaching. On y accède par une entrée appelée Strangers Gate, puis un escalier ; tous deux visibles au début du film A Vif (The Brave One, 2007), avec Jodie Foster, dont le personnage habite le quartier (elle sortira d’ailleurs du métro à la station 103rd).

great-hill-l

Petit stade en soi, hissé, comme le nom l’indique, sur un tertre, le site dispose d’une piste savamment arborée au milieu de laquelle s’étend une pelouse à peine gênée d’une saillie légère et plate de roche, de la forme et de la taille d’une semelle de Pantagruel. Tout autour, la même pelouse partagée par les chemins descend en douceur et propose comme des petits quartiers vallonnés. On y accède par un escalier côté rue, à l’ouest, et des chemins côté parc. En contrebas, deux fois la semaine, des équipes amateurs coachées s’affrontent au base-ball. Dans l’un des dévers, à l’opposé de l’escalier, un atelier de théâtre (des apprentis comédiens s’y donnent et y crient leurs tripes sous le regard d’un type qui peut dire stop, à quoi tu penses, là ?). Pour continuer le tour, plus loin, une femme reçoit des enseignements d’un yoga. Les sports s’y distribuent sans se gêner selon les jours. Le week-end, il ne faut pas y compter, c’est enfants coachés de parents munis de ballons de baudruche et surtout d’autres parents avec enfants pour savoir quoi faire ou le faire ensemble. Les quatre tables à pique-nique sont réservées parfois très tôt le samedi ou le dimanche matin, voire déplacées, pour accueillir plus tard les familles. La semaine, aucun enfant (à l’école dans l’année, sinon c’est summer camp (autrement dit centre d’animation) l’été). Trois ou quatre fois par jour, la voiture de la NYPD fait son tour, s’arrête à l’occasion, un flic lent en descend, visite les toilettes ou bricole un truc dans le coffre et le véhicule disparaît ; sinon, c’est la voiturette des jardiniers. À neuf heures, tous les chiens doivent être attachés. Donc, avant, ces chiens  se réunissent sur la pelouse centrale, se reniflent, se connaissent  entre eux, cavalent de façon très policée, sous le patronage de leur maître ou de leur tuteur, tous affublés des mêmes attributs : dans une main, la laisse et des sacs plastique, dans l’autre un téléphone portable (voire un thermos). De six à neuf, et à partir de dix-sept heures : plages journalières des coaches. Une heure. Efforts violents et répétés entrecoupés de temps de récupération. (“When you play, play hard; when you work, don’t play at all.” in Quotations of Theodore Roosevelt)

(((Vous vous sentez coincé ? Vous avez essayé d’autres façons d’améliorer votre vie, comme la psychothérapie ou les médicaments, mais vous n’avez toujours pas trouvé cette chose qui fait sens à la vie et lui confère lumière et intensité. Vous en avez assez de ne pas accomplir ce pour quoi vous ne savez même plus que vous êtes fait.

Le coach nous aide à comprendre ce que nous voulons et à savoir pourquoi nous le voulons. Le coach nous aide dans la création de plans d’action pour combler l’écart de l’endroit où nous sommes à là où nous voulons être. Le coach transforme notre vie.

(((Le coach se concentre avec nous sur la santé physique et émotionnelle, les relations parentales, les finances, le temps, la douleur, la spiritualité et le prochain niveau d’accomplissement et de succès. Êtes-vous prêt à vivre une vie plus inspiré, heureux et satisfait ? Mettre en place un rendez-vous et, ensemble, vous allez réaliser la vision la plus élevée pour vous et votre vie. Qu’est-ce que nous allons nous concentrer sur: la santé physique et émotionnelle, les relations parentales, les finances, le temps, la douleur, la spiritualité et le prochain niveau d’accomplissement et de succès.

Répétiteur, précepteur, professeur particulier, mentor semblent rester du côté des leçons culturelles ou scolaires ; entraîneur, lui, ne s’occuper que du corps ; tandis que coach, tout en faisant la part belle au corps, s’approprie des champs plus amples et complets. Et puis c’est américain. Le coach se cale dans la domesticité. Il étaie, il sert. Ma femme de ménage, mon psychanalyste, mon généraliste, mon concierge, mon secrétaire, mon réparateur d’ordi. Le coach est l’app essentielle. La multiplication des coaches à tous les endroits, à tous les moments… déployer… reforme l’homme, reconditionne l’homme… effet d’internet : bancal, atrophié, épaissi, embué, parasité… le coach replace dans le réel ? Le coach, nouveau tampon, entre soi et les autres.

Le coach pour choisir son coach.

Le coach est le lieu d’un sérieux avec nous-même, d’un efficace absolu, d’une prise en main ferme. Aucune pétulance, aucun flottement, aucune sérénité. Nous sommes machine.

Homme de l’ombre. Nous l’engageons pour notre rédemption et notre triomphe. Il s’y voue.

Max Dupain - Untitled - nude horizontal against black 1930

Les espaces discrets

Robert Mapplethorpe · Hand, 1980

B. J’avais ce que je désirais.

Grace Kelly

les bigoudis en couronne

Ingrid bergman cary

D’autres espaces discrets

René Burri Men on Rooftop Sao Paulo 1960

 

Nous sommes ensuite un récipient.

 

Avant de partir

7 juillet 2014 § Poster un commentaire

one flew over the cuckoo's nest

 

Incroyable mais vrai

6 juillet 2014 § Poster un commentaire

Vous ne devinerez jamais qui se cache derrière…? Ce qu’il a vu va vous couper le souffle… elle pensait que… mais l’incroyable va se produire… les 3 situations essentielles de… les pires moments de… Captatio benevolentiae de quelques mots assortis d’une image qui préparent le fracas d’une révélation, en fait, un ethos primaire : émotion, révolte (?), pitié… Il s’agit d’aguicher pour conduire à cliquer… stratégie du dévoilement ; tous les articles politiques, faits divers, sports, économie aguichent… tous les journaux deviennent des bêtisiers, des recueils de zappings, tous assujettis à l’impudeur. Il n’y a jamais grand chose à voir, l’important est d’attirer. Il s’agit donc d’une mise à nue toujours différée, d’une exposition en place d’une vérité, des coulisses d’un désordre temporaire qui renforce un ordre moral à peine tapi… car l’utilisation d’images ne sert qu’une seule cause, celle du sensationnel ; il ne s’agit pas de prendre conscience d’un phénomène ou d’une injustice. Il s’agit juste d’attirer les clics sur la page : rétribution. Le nombre de vues de chaque article est recensé sur la même page sous la forme d’un top 10 des pages les plus visitées et alpague un peu plus le viewer. Mais tout le monde sait ça.

Des effets propres à une écriture parée, ampoulée, variée, une écriture pour les autres, et qui ne se réduit qu’à ses effets.

toshiro-mifune 2

Ah là là, c’est pas bien beau.

Plus loin

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pluie 1

twinpeaks 2

dernière terrasse avant vacances

4 juillet 2014 § Poster un commentaire

Pierre et moi débutons. Puis Nicolas (Flawisky), à gauche de Pierre. Nous parlons de ses déboires dramatiques avec ses enfants et leur mère, les procès, l’argent dépensé, les années perdues. Silvia arrive, s’assied à ma droite ; elle a dîné. Les deux tables du fond occupées par des touristes qui partent, et arrivent ensuite Anton, Lusine et ?. Nous sommes surpris de le voir toujours entourés de jeunes femmes dont il fait ses modèles pour des photographies. Pierre dit (à qui ? j’ai oublié) : tu ne comprends pas la vérité de ce que tu dis. Ricardo, en bout de table, sur ma gauche. Puis Hélène, entre Ricardo et moi. Jean-Marie, vers 22 h 30 ou plus. Enfin un autre Pierre qui dînait plus loin se joint avec son amie. Il est tard. Dispute avec les deux nouveaux venus. Le Pierre en question veut nous expliquer Dostoïevski. Nicolas rigole. Nous manquons de bienveillance. Son amie demande que nous le laissions parler, mais il le fait d’une façon si péremptoire que nous ne tenons pas. Alors, elle nous injurie. Je me lève, réplique. Ça hurle. Mauvais vin. Le serveur ne porte pas des voiles comme je le croyais, mais plusieurs tatouages de post-it, une petite feuille de post-it, un bloc de post-it dont les feuilles du dessus semblent s’envoler. Et, enfin, il découvre sa chemise et montre son épaule : un paysage urbain nocturne et un personnage, James Bond. Je pars tard.

muetMary Pickford in 1917’s The Poor Little Rich Girl.

Vendredi, 4 juillet, jour du quart de finale Allemagne/France. J’allume la télé, puis l’éteins, ne réussis pas à m’intéresser. Surtout, la rumeur de la ville joue le match en clameur et en cris bien plus intéressants. Il est 19 h 37, silence partout. 20 h 11, les éboueurs, des voitures, pas de cris, La France a perdu, à mon avis. Les oiseaux. Un pays qui gagne fait plus de bruit.

Tout ce qui est placé avant le mot « mais » ne compte pas dans l’argumentation, tout ce qui précède, dans la concession, les « il n’en reste pas moins vrai que » ou les « cependant », ne compte pas, la première prémisse sert à endormir, elle flatte, elle rappelle les faits du point de vue adverse, elle passe du baume, elle feint de consentir.

Un visage beau, un livre qui marche, maquillage, étai, critique.

L’attrait de la boue, du sale, de la déchéance, de la souillure. Dickens, deux faces, abjection/pureté. Avilissement par l’habitude, le retour du même, la répétition confortable de la même situation.

Où suis-je ?

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